Nam June Paik (Kr)

Nam June Paik (Kr)
20 août 2016 Transcultures

Carré des Arts

4a, Rue des Sœurs Noires Mons

Gratuit

Fermé les lundis

Global Groove

Dans un contexte de globalisation croissante, Paik propose même une émission de télévision, Global Groove (1974) qui se réfère au concept « global village » (village planétaire) et répond à l’optimisme de Marshall Mac Luhan sur l’apport de la télévision. Il y mélange divers programmes musicaux alternant rock, musique d’avant-garde, musique classique, musique ethnique, poésies et publicités. Le rôle de l’artiste est dans le cadre du direct de précipiter les rencontres entre les cultures, de « faire entendre leurs accords imprévus ». Paik en fait la démonstration dans ses trois dernières œuvres, Good Morning, Mr. Orwell (depuis le Centre Georges Pompidou à Paris, 1984), Bye Bye Kipling (1986) ou Wrap Around the World (1988). Ce sont des émissions de satellite art connectant en direct David Bowie ou Ruychi Sakamoto à John Cage et Merce Cunningham dans des images prises à différents endroits du globe et mixées par Paik.

Global Groove anticipe sur deux pratiques télévisuelles : le zapping et la place croissante de la musique (pour Nam June Paik, le rock – dont on reconnaîtra la place importante dans les oeuvres de l’artiste – est le seul langage non verbal qui réunisse les générations).

Des fragments d’oeuvres de disciplines différentes, populaires et élitistes, traditionnelles et contemporaines, asiatiques, occidentales (principalement américaines) et ethniques (africaines, par exemple) coexistent dans un flux de séquences où l’espace planétaire est réduit au téléviseur et le temps à l’instant. Global Groove est un univers frénétique, dont le rythme souligne une grande maîtrise de la composition qui rappelle la formation musicale de l’artiste. La programmation et l’esthétique unique et novatrice de Nam June Paik sont un modèle pour la télévision.

Cette oeuvre fait partie du Fonds Vidéographie, plus de 130 émissions enregistrées et produites au Centre de production de Liège de la RTBF entre 1976 et 1986, en d’autres termes, les archives de l’émission culte Vidéographie.

Nam June Paik

« Marcel Duchamp a tout fait sauf la vidéo.
Il a fait une grande porte d’entrée et une toute petite porte de sortie.
Cette porte-là, c’est la vidéo.
C’est par elle que nous pouvons sortir de Marcel Duchamp. »
Nam June Paik, 1975

Nam June Paik est un artiste coréen considéré comme le fondateur de l’art video. Il est né à Seoul le 20 juillet 1932 et est décédé à Miami le 29 janvier 2006. Son génie est d’avoir compris que l’apparition de la télévision avait changé le monde. Musicien de formation, il a étudié le piano et soutenu une thèse sur Schönberg. Il arrive en Europe en 1956 pour travailler la musique électroacoustique auprès de Stockhausen. Il se rapproche rapidement du groupe informel fluxus et de John Cage qui devient son maître.

En 1964, Paik abandonne la musique et part pour New York et se rapproche du fondateur de fluxus, George Maciunas (1931-1978), puis pour le Japon où il invente, avec l’ingénieur Shuya Abe, un des premiers synthétiseurs vidéo (1969-1970). Cet instrument permet de colorier et déformer les images des caméras, de les modifier en produisant des interférences sonores.

Le travail sur l’électronique de Paik va dans toutes les directions avec un penchant pour la provocation et le « terrorisme culturel ». Paik évolue vers la sculpture, toujours associée à la vidéo, lui valant le surnom de « pape de la vidéo ». Il réalise un objet (T.V. Chair, 1968) ou une statue (T.V. Rodin où Le Penseur contemple son image dans un téléviseur, 1978), voire des sculptures d’écrans (Benjamin Franklin, Jean-Jacques Rousseau dans les années 1980). Il multiplie le nombre d’écrans : 384 dans Tricolor Vidéo en 1982, 1 003 pour la tour-média Tadaikson (The More The Better), à l’occasion des Jeux Olympiques de Séoul en 1988.